Né le 20 avril 1840 à Bordeaux

Mort le 6 juillet 1916 à Paris.odilon-redon-maison

« Au printemps, après la mort de ma tante Juliette Dodu, nous allions nous installer à Bièvres dans la propriété qu’elle nous avait laissée.

Là, se levant de bonne heure, mon père aimait commencer sa journée assis au fond du jardin, à lire quelques pages de Pascal, son auteur favori, ou de Montaigne, de Suarès, ou de Rémy de Gourmont.
Ma mère, pendant ce temps préparait avec soin et amour, son modèle : un grand vase de fleurs.
C’est là que, bien souvent, en voisin, venait le surprendre son grand ami Gustave Fayet ; parfois, il lui contait une bonne histoire méridionale et la journée se terminait alors par de grands éclats de rire. »

Ari Redon (fils d’Odilon Redon) – La Revue des Arts – 1956

A partir de 1909, Odilon Redon vient passer l’été à Bièvres, dans la Villa Juliette, rue du Petit Bièvres.
« J’ai élu domicile au fond du jardin, dans le retiro pour peindre » – écrit Odilon Redon, à G. Fayet le 3 août 1911 ;

odilon-redonII meurt à Paris le 6 juillet 1916. Il est enterré au cimetière de Bièvres. La rue qui y conduit porte son nom

1840 : 20 avril, naissance à Bordeaux d’Odilon Redon. Enfance solitaire dans la propriété familiale de Peyrelebade en Médoc. Un lieu qui eut sur mon enfance et ma jeunesse et même sur ma vie hélas ! beaucoup d’influence.

1847 : Premier séjour à Paris, visite des Musées. Une empreinte en ma mémoire est restée des tableaux de drames…

1851 : Etudes scolaires à Bordeaux.

1855 : Leçons de dessin dans l’atelier du peintre bordelais Stanislas Gorin. Très indépendant, il me laisserait aller à mes sympathies… Au musée des Beaux-Arts et aux expositions de la société des amis des arts, découvre Delacroix et les maîtres contemporains.

1856 : Amitié avec le botaniste Armand Clavaud. Je dois aux entretiens de cet ami, d’une intelligence si lucide, les premiers exercices de mon esprit, de mon goût, les meilleurs peut-être…

1859 : Paris – Etudes d’architecture. Echec à l’examen d’entrée à l’école des Beaux-Arts. …Rien n’est perdu dans une étude, je crois devoir beaucoup à celle que je fis comme aspirant architecte.

1863 : Paris : Elève libre de l’atelier de Gérome à l’école des Beaux-Arts. L’enseignement qu’on me donna ne convenait pas à ma nature.

Bordeaux : amitié avec le graveur Rodolphe Bresdin. Qui m’initia avec le plus grand souci de mon indépendance à la gravure et à la litho…

1868 : Publie un compte-rendu du Salon dans le journal bordelais La Gironde où il définit sa position par rapport au mouvement contemporain. Reçu au Salon avec Roland à Roncevaux – Rencontre Corot, Chintreuil, Fromentin.

1870 : Décoration murale pour une chapelle d’Arras. Participe à la campagne de France.

1872 : S’installe à Paris bd Montparnasse, fréquente le Salon littéraire et musical de Madame de Rayssac. La musique est vraiment l’art inspirateur par excellence.

1879 : Album : Dans le rêve.

1880 : Epouse Camille Faite. Le oui que j’ai prononcé le jour de notre union, fut l’expression de la certitude la plus entière et sans mélange que j’ai ressentie.

1881 : Première exposition de fusains à la Vie Moderne. Il y eut un froid et une réserve qui resteront dans mon souvenir comme une énigme.

1882 : Deuxième exposition de fusains au Gaulois. Relations amicales avec Hennequin et Huysmans.

1883 : Album : Les Origines. L’on regarde beaucoup, l’on achète peu.

1884 : Expose au 1er Salon de la société des Artistes Indépendants dont il devient Président.

1885 : Album : Hommage à Goya. Amitié avec Mallarmé. Un allié d’art d’une sûreté absolue. Portrait de Madame Redon.

1886 : Naissance et mort de son fils Jean. Le temps n’affaiblit pas l’émoi causé par une telle mort. Il peut donner prise à des activités qui remplissent les heures et passionnent à nouveau, mais au premier silence, au premier loisir indolent, le rappel est sensible et le mal ouvre sa plaie.

– Expose avec Gauguin au Salon des XX à Bruxelles.

1887 : Frontispice pour Les soirs de Verhaeren.

1888 : Album : La Tentation de St-Antoine (1ère série) inspirée de l’œuvre de G. Flaubert.

1889 : Naissance de son fils Ari. Participe à la 1ère exposition des peintres graveurs chez Durand Ruel.

1890 : Expose au 2e Salon des XX à Bruxelles ou il se rend avec Mallarmé.

Album : Les Fleurs du MalLes Yeux Clos.

1891 : Album Songes dédié à la mémoire de son ami Clavaud mort en 1890. Il est là-bas dans l’immuable silence et la paix, aux sources tranquilles où l’on ne souffre plus.

1892 : Lithographie : Parsifal d’après l’œuvre de Wagner.

1894 : Plusieurs expositions.

1895 : Voyage à Londres.Elle est toute propice au clair obscur et aux noirs.

1896 : Albums : La Maison Hantée, La Tentation de St-Antoine (3e série).

1897 : Dernier séjour à Peyrelebade qui va être vendu par sa famille. …Quitter un lieu habituel participe de la mort.

1898 : Expose chez Vollard. Ari Redon à neuf ans.

1899 : Expose avec les jeunes peintres chez Durand Ruel, l’exposition prend la forme d’un hommage à Redon. Dernier Album. Lithographie : L’Apocalypse de St-Jean

1900 : Maurice Denis le représente aux côtés des Nabis avec son Hommage à Cézanne.

Amitié avec Gustave Fayet (peintre collectionneur).

1901 : Peintures décoratives pour le château de Dommecy en Bourgogne et pour le compositeur Ernest Chausson à Paris.

1903 : Décoré de la Légion d’Honneur.

1904 : Salon d’automne : une salle lui est consacrée. Le musée du Luxembourg achète Les Yeux Clos.

1909 : Passe les mois d’été à Bièvres dans la maison de Juliette Dodu, la demi-sœur de sa femme.

1910 : Décoration de la bibliothèque de l’abbaye de Fontfroide (Aude) pour Gustave Fayet.

1911 : Portrait de Madame Redon.

Tombe d'Odilon Redon

Tombe d’Odilon Redon

1912 : La Coquille.

1913 : Participe avec 40 œuvres à l’exposition internationale de New-York.

Mellerio publie le catalogue de son œuvre gravée et lithographique.

1914 : Ari est mobilisé….Nous vivons des heures d’angoisse.

1916 : Mort de Redon à Paris le 6 juillet. Enterré au cimetière de Bièvres.

Avant 1870, Odilon Redon exécute des copies d’après les maîtres, des études de fleurs discrètes et sensibles, ses premiers paysages et « l’autoportrait ».
Après 1870, un écart se crée entre dune part les NOIRS (fusains et lithographies) et d’autre part ses œuvres peintes qui sont des paysages de petits formats, exécutés sur le motif dans le Médoc, en Bretagne et dans les environs de Paris.
Le peintre appelle ces paysages non destines à la vente : Etudes pour l’auteur, qui se limitaient pour lui : à la reproduction directe de la réalité.

Les rapports de Redon avec la littérature

A partir de 1867 et jusqu’à la veille de sa mort, Odilon Redon tient un journal dans lequel il note, en dehors de toute anecdote et de référence aux détails de sa vie quotidienne, ses remarques et ses pensées sur l’art.
Partiellement réunis et édités après sa mort sous le titre : A soi-même, ces textes constituent la meilleure source pour notre connaissance de son œuvre.
Robert Coustet

Les textes présentés en italique sont extraits de :
A soi-même.

« La lecture est une ressource pour la culture de l’esprit : elle permet ce colloque muet et tranquille avec le grand esprit « 
Le peintre qui a trouvé sa technique ne m’intéresse pas note-t-il en 1808. Il se lève chaque matin sans passion et tranquille et paisible, il poursuit le labeur commencé la veille.
Je lui soupçonne un certain ennui propre à l’ouvrier vertueux… J’aime ce qui ne fut jamais »

« J’ai subi les tourments de l’imagination et les surprises qu’elle me donnait sous le crayon mais je les ai conduites et menées, ces surprises, selon les lois d’organisme d’art que je sais, que je sens, à seule fin d’obtenir chez le spectateur, par un attrait subit, toute l’évocation, tout l’attirant de l’incertain, sur les confins de la pensée. »

Odilon Redon a préféré la tranquillité de sa bibliothèque à l’agitation du monde : « Le plaisir de lire dans une chambre tranquille avec la fenêtre ouverte sur la forêt. »

Ombres et Clartés

Pendant des années, dans l’isolement de Peyrelebade, Odilon Redon va demander au fusain, le moyen de traduire sa pensée, de donner vie à ses rêves.
« Le mot « NOIR » a été choisi par lui-même. Le fait est que le fusain, charbon à la fois poussiéreux et gras, est comme de l’obscurité matérialisée. Il ne permet pas des tracés aussi légers que le crayon dont il n’a pas la transparence argentée. Mais il possède de l’onctuosité, de l’épaisseur, il peut se dissoudre en poudre légère ou se densifier en plages opaques. Redon a réussi à exploiter des possibilités insoupçonnées avant lui. Dans une même œuvre il juxtapose hachures légères et zébrures estompées, traits incisifs et épaisseurs veloutées plus ou moins largement étalées. Il a découvert que le fond, laissé en réserve, prenait une intensité particulière. D’où son attention minutieuse à la qualité du papier, teinté en gris, bleuté, jaune ou chamois. Son grain se mêle à celui du charbon auquel il donne par transparence une tonalité chaude ou froide ; laissé en réserve il affleure en luminescences incertaines ou éclate en fulgurantes clartés. Dans les Noirs le fusain et son support sont indissociables et n’existent que l’un par l’autre de la même façon que l’obscurité ne se définit que par rapport à la lumière. »

Vers la lumière

A partir de 1890, Redon va tenter une transposition colorée des thèmes des Noirs. Progressivement de 1890 à 1900, la couleur envahit son œuvre, entraînant une véritable rupture avec le fusain.
Cette évolution a été mise en rapport avec les événements de la vie du peintre.
Le fait décisif semble avoir été la vente de Peyrelebade.
Redon rompait avec sa famille et définitivement avec le cadre qui depuis son enfance exacerbait sa sensibilité et nourrissait ses rêves et son inspiration.
Dans le même temps, ses œuvres sont reconnues : il est entouré de jeunes peintres et d’écrivains.
Il s’installe dans l’atelier qu’il désirait.
Il effectue de nombreux voyages.
Son plus grand bonheur sera la naissance de son fils : Ari en1889.

Pour lui l’impressionnisme réduit l’art de peindre à la représentation des choses extérieures ; alors qu’il assigne à l’art, la mission de dépasser les apparences du réel et d’explorer les mondes invisibles du rêve, de l’âme, de la subjectivité.
Quand arrive le symbolisme, il est à l’avant garde.

L’univers d’Odilon Redon p. 41

C’est par le « Pastel » que s’opère le passage de l’œuvre noire à l’œuvre colorée, l’artiste retrouvant dans cette matière souple, poudreuse, les qualités du fusain qu’il appelait le « Pastel Noir ».
Le pastel ainsi que l’aquarelle expriment la détente de son inspiration : Les tons ont une joie qui me repose.

En 1908, Gustave Fayet et sa femme entreprennent de restaurer l’abbaye de Fontfroide, abbaye cistercienne qui avait été jusqu’au 18e siècle, le centre culturel du Languedoc et qui se trouvait alors à l’état d’abandon.
Cette abbaye devient le lieu de réunion de leurs amis : écrivains, poètes, musiciens, peintres.Redon y séjournera souvent.
Dès 1910, il décore la bibliothèque.

Sur deux panneaux de 6,50 m de long, il place face à face, en antithèse la Nuit et le Jour, qu’il compléta par un dessus de porte consacré au Silence.
Dans des tons gris et bleus associés aux rosés de l’aube et aux pourpres du couchant la Nuit ouvre la porte aux: rêves, aux fantasmagories incertaines, aux intuitions originelles et à la mort.
En regard, dans un paysage incandescent ou pleuvent les fleurs, les chevaux du Jour s’élancent dans la lumière.
Au-dessus de la porte, un mystérieux visage aux yeux mi-clos, un doigt sur la bouche, invite au recueillement et au silence.

Source: Bièvres et ses célébrités au 19e siècle

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